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Page:Laforgue - Œuvres complètes, t4, 1925.djvu/53

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LETTRES 1881-1882

toilette. Les princes feuillettent des albums, les demoiselles brodent. L’Impératrice fait de l’aquarelle. Une place est vide, l’Impératrice me fait asseoir. Je suis entre la comtesse Hacke et l’une des princesses.

Je lis comme dans un rêve, tâchant d’assurer ma voix. Peu à peu, je reprends ma présence d’esprit, je songe à bien lire ; et bien m’en a pris !!!!!

J’arrive à un passage un peu leste !! la comtesse Hacke me regardait inquiète, ou du moins, je le devinais ; sans faire semblant de rien, j’ai sauté habilement le passage[1] ! Sauvé, mon Dieu ! la comtesse seule a dû s’en apercevoir, j’ai deviné un regard de reconnaissance. J’en aurai vu de belles dans ma bizarre vie !

Puis l’Impératrice m’a demandé des détails sur les expositions de peinture à Paris, etc… je répondais avec assurance.

Puis on s’est levé, et, le cœur léger, je suis rentré dans mon cabinet de travail, avec un bon feu et, sur ma table, un souper auquel je n’ai pas encore touché (pâté, cuisse de poulet, petits fours) et je t’écris ! Il pleut — minuit, les fenêtres de la Reine sont éclairées.

  1. On a vu plus haut ce qu’était ce passage « un peu leste ».