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Page:Laforgue - Œuvres complètes, t4, 1925.djvu/63

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LETTRES 1881-1882

J’ai cinq fenêtres en tous sens. Je ne vois que des monuments. Et des officiers au monocle pâle !

Ah ! si vous voyiez comme je suis logé ; mon cabinet de travail est quatre fois grand comme celui de la rue Séguier ; il contient six tables dont deux grandes, et n’en est pas encombré. Deux immenses canapés, deux glaces, deux fauteuils, dix chaises, une bibliothèque, et un grand calorifère qui monte jusqu’au plafond, puis une antichambre, et ma chambre à coucher. Du feu toute la journée dans mes trois pièces.

Mon domestique est un brave homme qui, sachant mon ignorance de la langue, se multiplie, me devine, me sert sans me parler. Il y a une idée féconde là-dedans. Le domestique de l’avenir. Les muets.

Quoi de plus ? Tous les soirs à 7 1/2 je vais au palais, à deux pas. Je cause une demi-heure avec la plus vieille des dames d’honneur, la comtesse Hacke (qui m’a dit orthographier le français comme un cochon (sic), puis l’Impératrice vient, et je lui fais la lecture. Hier au soir elle venait de dîner avec Maxime Du Camp. J’avais dans la journée dépouillé les Continuateurs de Loret, de J. de Rothschild, et je les lui ai résumés. Je crois que j’y mets plus de zèle que mes prédécesseurs.