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BERLIN. LA COUR ET LA VILLE

nouveaux invités. L’ambassade de France passe d’un air volontiers très effacé, les deux attachés militaires, — deux artilleurs, — le képi de la petite tenue à la main, le plus jeune des deux, un capitaine, excitant la stupéfaction des officiers allemands par sa poitrine vierge de décorations. L’aîné des deux attachés est à Berlin depuis longtemps et a l’air fort blasé ; le plus jeune, qui occupe son poste depuis un an, faisait bien triste figure dans les premiers bals, ne connaissant personne et ayant visiblement un peu de rage au cœur, à traverser cette galerie entre deux haies d’officiers prussiens étalant leur morgue, malgré eux, entre deux rangs de tableaux étalant sans discrétion de terribles souvenirs.

Voici l’ambassadeur d’Autriche, dans son manteau de fourrure trop parfumé, avec son bonnet à plumes de héron et ses petites bottes à gland ; l’ambassadeur de Russie avec sa toque d’astrakan blanc et ses bottes de simple soldat ; l’ambassadeur de Turquie, grave et caressant sa barbe, le plus doré de tous, et aussi celui qui baise la main de l’impératrice avec le style le plus pur.

Quand le corps diplomatique a disparu vers la Salle Blanche, arrive, ébranlant lourdement