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Page:Laforgue - Œuvres complètes, t6, 1930.djvu/282

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ŒUVRES COMPLÈTES DE JULES LAFORGUE

La Maison de l’Impératrice

La maison de l’impératrice se compose d’une grande-maîtresse, de deux dames du palais, d’un maître de cour, d’un secrétaire particulier et de plusieurs demoiselles d’honneur et chambellans qui se relayent à tour de rôle, suivant les exigences du service.

La grande-maîtresse, la comtesse de Perponcher, belle-sœur du maréchal de cour de l’empereur, est une aimable femme, très grande dame, affable, polie, remplissant admirablement les devoirs de sa place, toujours prévenante, toujours accueillante, ne se distinguant en rien que par une immense perruque noire posée en forme de tour au sommet de la tête, aussi nulle que bonne, aussi insignifiante que bien intentionnée. Elle donne des soirées un peu plus gaies qu’un enterrement, mais où l’on tient cependant à être invité, car on y coudoie toutes les altesses royales ou sérénissimes qui se trouvent à Berlin.

Des deux dames du palais, l’une, la comtesse Adélaïde Hacke, est bossue, et sans avoir l’esprit qui distingue d’ordinaire cette variété de l’espèce humaine, en possède la méchanceté. Elle a une grande influence sur l’impératrice, qu’elle malmène quelquefois. C’est l’alter ego de la souveraine, la personne qui la remplace dans toutes les circonstances où cela est possible. Elle aime l’intrigue, le mouvement, le bruit. Sa voix douce a des accents faux et affectés, elle dit