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Page:Laforgue - Œuvres complètes, t6, 1930.djvu/286

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ŒUVRES COMPLÈTES DE JULES LAFORGUE

se donne un mal infini pour qu’on la croie instruite, lettrée, au courant de tout ce qui se passe dans le monde de la science et des arts, et aussi afin de se rendre populaire. Mais elle n’a aucune dignité, aucun esprit de conduite, elle confie ses secrets à sa femme de chambre, Mlle de Neundorf, et cette dernière se livre, en commun avec plusieurs dames du grand monde, à toutes sortes de petites intrigues, à la tête desquelles se trouve l’impératrice.

Elle s’entoure de courtisans et de favorites qui sont les premiers à dire du mal de leur protectrice. Bonne femme au fond, très charitable, mais ridicule par ses efforts à vouloir paraître remarquable. Son cœur est excellent, sa bonté inépuisable, mais elle ignore l’art de donner et a le talent d’ôter à ses bienfaits tout leur prix. Fatigante à force d’être aimable, elle obtient toujours le contraire de ce qu’elle désire. Peu aimée en général, elle n’a jamais été appréciée. On ne croit ni à sa philanthropie, ni à sa charité, ni à aucune des qualités qu’elle possède réellement. Elle fatigue tout le monde, depuis l’empereur jusqu’à ses domestiques. Malheureuse créature, mais malheureuse surtout par sa propre faute. Lorsqu’elle disparaîtra, on poussera un soupir de soulagement, mais on la regrettera plus tard.

L’impératrice d’Allemagne est l’aide de l’empereur, la grande associée à l’empire. Elle aime beaucoup les Français, qui la connaissent peu et la jugent mal.

(P. 8 et 9.)