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Page:Laforgue - Œuvres complètes, t6, 1930.djvu/31

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BERLIN. LA COUR ET LA VILLE

et les valets à la cour ne portent jamais la moustache, et c’est là une curieuse protestation (anglaise et française) contre les gens de maison à Berlin qui portent la barbe à leur gré et surtout la moustache.

Le dîner chez l’empereur est terminé. Je croise, dans une même calèche, deux figures correctes en habit qui assurément « ne sont pas d’ici », comme on dit vulgairement à Berlin. Ce sont le duc de Sagan et le comte Guillaume de Pourtalès ; l’un petit, cocasse à force de réaliser dans sa mise le type du gentilhomme Restauration, heureux de vivre dans une cour et de circuler aux fêtes en un uniforme, l’autre, un superbe reste de viveur avec sa tête d’une calvitie imposante et sa grande barbe blanche, qui lui permettent de poser dans les tableaux vivants à la cour les vieux pèlerins, les grands seigneurs magyars et autres sujets, heureux aussi de vivre dans une cour et revêtant pour les bals de gala un superbe costume rouge inconnu. Le duc (avec la duchesse sa femme, petite-fille du maréchal Castellane) et le comte sont les grandes ressources, comme conversation, des thés que donne et préside autour de sa table l’impératrice.