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ŒUVRES COMPLÈTES DE JULES LAFORGUE

avec fermeté et en même temps avec ce bredouillement presque bourru des vieux militaires qui préfèrent les solides poignées de main aux beaux discours. Les Hohenzollern sont extrêmement prodigues de poignées de main. L’empereur sait passablement le français, mais il n’y a jamais mis de prétention et, depuis longtemps, il n’a guère à émettre que des formules en cette langue. Il sait mieux l’anglais, conséquence du séjour forcé en Angleterre, lors des événements de 1848, séjour que le prince exilé mit aussi à profit pour étudier un peu et compléter, surtout pour les études historiques, son instruction qui fut toujours moins que brillante.

L’empereur n’a jamais été un lettré ; la science, comme l’art, lui est absolument fermée ; il ne s’intéresse même pas à la littérature allemande. Il n’a lu qu’un seul roman français, le Juif errant d’Eugène Suë. Il n’y a, sur sa table, que des brochures relatives à l’armée et, toutes les semaines, il feuillette les images de l’Illustration, du Graphic, du London News. On n’a jamais vu l’empereur (pas plus que MM. de Bismarck, Moltke et toute cette génération de héros) dans un musée ; et, l’été dernier, on a eu