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Page:Laforgue - Œuvres complètes, t6, 1930.djvu/68

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ŒUVRES COMPLÈTES DE JULES LAFORGUE

confortable dans ce palais : pas la moindre salle de bain, par exemple ; tout est meublé d’un pêle-mêle de cadeaux de Noël, de quelques présents de la Chine et du Japon, de dons offerts par des délégations nationales à l’occasion d’anniversaires et d’achats faits à Paris, à l’Exposition de 1867. On sait les traditions d’économie des Hohenzollern : autrefois, c’était pauvreté, mais aujourd’hui ! En montant sur le trône, Guillaume Ier n’avait que des dettes : la liste civile du roi de Prusse est de neuf millions. Il n’en a pas été établi pour l’empereur d’Allemagne. Aujourd’hui, Guillaume Ier est riche : un seul homme, le banquier Kohn, sait le chiffre exact de sa fortune. En évaluant ses revenus personnels à dix-huit millions, on ne se tromperait guère. L’empereur veut être tenu au courant de la plus minime dépense. Le personnel du palais est très restreint et composé de vétérans peu difficiles. Les appointements de la plus haute charge de la cour s’élèvent à trente mille francs. Les intendants sont constamment sur le qui-vive : leur bête noire est un trio de maîtres-cuisiniers français imposés par le bon goût de l’impératrice, et qui passent pour faire fortune avec une désinvolture par