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Page:Laforgue - Œuvres complètes, t6, 1930.djvu/71

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BERLIN. LA COUR ET LA VILLE

ses grandes colères, en se contentant de murmurer :

— Ce n’est rien, c’est le sang russe qui remonte (le sang de l’empereur Paul de Russie).

Le matin, c’est l’impératrice qui, vers dix heures, descend rendre visite à l’empereur. C’est en général le seul moment où les deux majestés se parlent sans témoins. Assurément, la politique ne fait guère les frais de la conversation. L’impératrice, qui a renoncé à s’immiscer dans la direction des affaires, surtout des affaires religieuses — et y a si bien renoncé qu’elle s’est même réconciliée avec son vieil ennemi le prince de Bismarck — l’impératrice se contente aujourd’hui, comme un simple particulier, d’être tenue au courant par les télégrammes de Wolff et par les résumés du Temps et des Débats (ces derniers même lui exposent, paraît-il, plus clairement les affaires allemandes que ne le fait la Gazette de Cologne). Ce dont on cause plutôt, c’est de tel mariage dans la famille ou à côté, de telle audience prochaine et très délicate, du prochain bal, etc. Ce dont on cause surtout, c’est du singulier état de choses existant entre les deux souverains et la maison du prince héritier, et de l’attitude à tenir