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Page:Lange - Histoire du matérialisme, Pommerol, 1879, tome 2.djvu/540

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moderne l’eût dompté et bridé ! Si par hasard on se figure que la doctrine de l’Église ne peut plus offrir au rationalisme absolu d’occasions de polémiques et d’hérésies grandes et ardentes, que l’on jette seulement un coup d’œil sur les quelques thèses de la science de la nature, regardées par Ronge comme assez importantes, assez inébranlables pour entrer dans son catéchisme de la jeunesse (19). On y trouve de très-nombreuses assertions que la science, qui progresse toujours, a reconnues erronées ou rendues très-douteuses. Il est vrai que de pareilles erreurs pénètrent toujours dans les écoles, ou se propagent par la littérature scientifique populaire et se maintiennent parfois avec une étonnante ténacité. Les théories sur l’existence d’un soleil central, sur le système complet de la voie lactée, qui se répète dans les nébuleuses, sur l’habitabilité de la plupart des corps célestes par des « êtres raisonnables comme les hommes », sur les comètes comme formes de transition dans la formation des corps célestes et beaucoup d’autres théories analogues hantent ainsi pendant longtemps les intelligences humaines, sans qu’il en résulte grand inconvénient. Mais, quand de semblables idées reçoivent la consécration de la religion et quand, pour comble de malheur, cette religion est soutenue et entretenue par un clergé jaloux de son autorité, leurs effets avec le temps deviennent bien plus dangereux, et il est encore impossible de prévoir si une science de la nature, libre et indépendante, ne finirait point par disparaître dans un tel voisinage. Quelles luttes ne pourraient pas être suscitées par l’apparition de grands principes nouveaux, tels que le darwinisme ! Déjà ce dernier en suscite ; mais qu’elles sont inoffensives comparées à des luttes religieuses quelconques ; et combien elles seraient encore plus inoffensives, si même aujourd’hui l’intervention de la religion dans le débat ne produisait quelque aigreur. Si l’État se décide enfin, comme c’est son devoir naturel, à introduire l’enseignement des sciences physiques dans toutes les écoles primaires, on aura obtenu un progrès notable