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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/103

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LA CRITIQUE DE BOILEAU.

la vérité. Jodelet meurt ; la scène est livrée à Molière, et maintenant, dit La Fontaine,

Et maintenant il ne faut pas
Quitter la nature d’un pas.


Lui-même, le bonhomme, en son genre, la suivait, exquis à force de fidélité sobre, et présentait, à la place des intempérantes enluminures de l’âge précédent, ses fins tableaux, d’une touche si discrète et d’un sentiment si intense. Racine enfin jette au rebut les mannequins élégants de Quinault, et produit des hommes, de vraies âmes humaines, douloureuses et vivantes : si vrai, qu’avec sa grâce puissante, il fait parfois l’effet d’être brutal à ce beau monde, accoutumé à tout ennoblir et à tout affadir. Et Boileau leur dit à tous qu’ils font bien, console leurs disgrâces, célèbre leurs triomphes, leur montre l’idéal, c’est-à-dire la nature, et leur souffle le courage de s’y tenir.

On devine maintenant pourquoi il est si attentif à brider l’imagination. Il est dans la situation de nos naturalistes qui redoutent avant tout les écarts de romantisme : et c’est pourquoi la meilleure interprétation qu’on ait donnée des idées de Boileau est dans ces lignes de M. Zola :

Le plus bel éloge qu’on pouvait faire autrefois d’un romancier, était de dire : « Il a de l’imagination ». Aujourd’hui cet éloge serait presque regardé comme une critique…. L’imagination de Balzac, cette imagination déréglée qui se jetait dans toutes les exagérations et qui voulait créer le monde à nouveau, sur des plans extraordinaires (ne dirait-on pas que ceci