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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/115

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LA CRITIQUE DE BOILEAU.

comme en science, la création n’est qu’observation et intuition ; en sorte que l’invention ne consiste pas à tirer de son esprit ce qui n’a d’existence nulle part ailleurs, mais bien à extraire de la nature ce qui y est, et ce qu’on s’étonnera de n’y pas avoir vu, dès qu’un homme de génie l’aura montré.

Voilà les principes qui constituent le naturalisme de Boileau : théorie simple et large, et bien éloignée d’être cette réglementation tyrannique que supposaient les romantiques. On peut remarquer qu’elle n’est pas purement littéraire : elle enveloppe une esthétique générale. Tandis que Perrault, dans ses Parallèles, se donnera bien du mal pour réduire tous les arts à son système, et les faire marcher tous du même pas dans son idée du progrès indéfini, Boileau, sans parler de peinture ni de sculpture, sans y penser, n’y entendant peut-être pas grand chose, mais concevant la poésie comme un art, et lui donnant pour but l’imitation de la nature, va au delà des règles littéraires, et propose vraiment une formule d’où peut sortir une théorie générale des beaux-arts.

On pourrait même dire que les principes de Boileau s’appliquent plus immédiatement, plus complètement, plus aisément aux arts plastiques qu’à la poésie : ils sont en eux-mêmes plus artistiques que littéraires. Il faut bien des réserves, bien des précautions, et le secours parfois d’une subtile interprétation, pour les adapter à la littérature efficacement, et sans danger.