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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/119

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LA CRITIQUE DE BOILEAU.

part des défaillances de son jugement et des erreurs de sa théorie ne procèdent pas d’une autre cause. Ne comprenant pas qu’elle seule pouvait lui fournir un sûr moyen de dégager le général et l’essentiel dans l’infinie complexité des apparences, il tâcha instinctivement d’y suppléer par l’étude des anciens. En imitant dans les anciens ce qu’on reconnaît être naturel, et dans la nature ce qu’on retrouve chez les anciens, on peut se tenir assuré de ne point s’égarer dans l’expression des particularités insignifiantes, et des exceptions monstrueuses. La comparaison des œuvres antiques et de la réalité actuelle fait ressortir un élément commun, et cet élément commun est justement cette nature raisonnable, universelle, immuable, qui est l’objet de la poésie. La méthode est bonne, mais il eût fallu le sens et la connaissance de l’histoire pour l’appliquer toujours avec succès. Boileau s’embarrasse parfois entre l’actualité et l’antiquité, et définissant mal leur rapport, établit des règles ou arbitraires ou fausses, qui même nous semblent contradictoires à l’esprit de sa doctrine, et restreignent ou infirment l’excellent principe de l’imitation de la nature.

Comment ce critique naturaliste, et ce naturaliste surtout qui a fait le Repas ridicule, condamne-t-il le poète bucolique qui

Fait parler ses bergers comme on parle au village ?


Pourquoi cette peur de la rusticité, chez un écrivain que la trivialité, même répugnante, n’a pas toujours