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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/132

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BOILEAU.

port avec la couleur locale des romantiques. La vérité de l’histoire n’a, pour Boileau, qu’une valeur négative. Racine, en écrivant Iphigénie ou Bajazet, ne s’est pas soucié d’archéologie ni d’orientalisme : mais il a costumé ses caractères généraux selon l’idée qu’il se faisait des Grecs ou des Turcs. Et même cette idée qu’il avait allait un peu au delà de ce qu’exigeait à l’ordinaire le public : mais, au fond, il ne déroutait pas les spectateurs, et ne leur présentait rien que leur degré de culture ne leur figurât aisément : ainsi il atteignait son but, qui était seulement d’empêcher leur attention de se détourner sur le détail et l’accessoire, et de la ramener tout entière sur la peinture des passions. En effet, indifférents à la vérité de ces choses extérieures dont la fausseté les eût révoltés, les spectateurs se livraient tout entiers aux impressions du drame psychologique que développait le poète.

La vraisemblance encore soumettait la tragédie aux unités ; et la vraisemblance enfin imposait à la tragédie un langage simple et naturel, sans pompe et sans déclamation.

Il faut dans la douleur que vous vous abaissiez ;
Pour me tirer des pleurs, il faut que vous pleuriez.


Nous savons tous par expérience qu’on ne fait pas de phrases quand on est violemment ému : la vraie douleur n’a pas d’esprit.

Ainsi, dans toutes ses parties et dans toute sa forme, la tragédie doit être vraisemblable. Ce n’est