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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/33

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L’HOMME.

sence eût semblé naturelle dans la foule des gentilshommes qui suivaient le roi.

Boileau fit encore deux voyages, en Alsace et en Flandre ; puis il se tint en repos, laissant à Racine la principale part de travail, comme aussi des libéralités royales, qui semblent s’être proportionnées à l’activité déployée par chacun des deux collaborateurs. Au reste, le roi ne cessa d’être satisfait de son application, et il le lui témoigna en le faisant entrer à l’Académie, presque malgré la compagnie.

En dépit de cette faveur déclarée du roi, notre poète ne fut jamais autant de la cour que Racine. Plus froid et moins souple, de jour en jour aussi moins valide, il s’en retira peu à peu : après la mort de Racine, il n’y vint plus qu’une seule fois. Il y avait longtemps qu’il avait renoncé aux cabarets et à la société des comédiens. Et le monde même, maintenant qu’il ne produisait presque plus rien, ne le recherchait plus, et ne le voyait guère. En dehors de quelques amis très intimes et de son rang, il n’avait guère habitude que chez le Premier Président, M. de Lamoignon. Tandis que, sous l’apparence de la dévotion, la cour inclinait au cynisme débraillé, et que dans les salons commençait à éclore une nouvelle sorte de préciosité, philosophique et scientifique, l’hôtel de Lamoignon continuait la tradition des anciennes maisons de magistrats, graves et décentes, où toutes les belles éruditions étaient en honneur, où le bel esprit même et la plaisanterie