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LA POÉSIE DE BOILEAU.

l’établissement des manufactures en France. Il s’est échappé à dire que c’étaient là ses meilleurs vers, sans se douter que jamais il ne s’était plus écarté de son vrai génie.

Mais par là même il plaisait à ses contemporains. Les Satires et les Épîtres étaient des morceaux bien écrits, bien pensés, selon les idées moyennes du siècle. Ces gens-là étaient moins blasés que nous sur tous ces lieux communs de morale ; et, après tout, il n’y avait guère plus d’un siècle qu’on les avait trouvés ou retrouvés. Puis la littérature n’avait en vérité à présenter rien de pareil aux Épîtres ; quant aux Satires, elles pouvaient passer pour les chefs-d’œuvre du genre, quand on les comparait aux pièces de Courval-Sonnet et de Du Lorens, et des autres dont on ne sait même plus les noms aujourd’hui. Nous nous satisfaisons aujourd’hui à moins bon compte.

Nous avons peine aussi à convenir que les dissertations morales de Boileau, ses nobles démonstrations de la sottise humaine, ou ses languissantes diatribes contre le faux honneur et l’équivoque, soient de la poésie. Nous le dirions encore moins de l’Épître IV, ce fragment d’épopée élaboré par la tête la moins épique du monde, où chevauchent si étrangement cuirassiers et courtisans parmi des naïades effarouchées, où, selon l’exorde et la conclusion, l’intérêt principal se porte moins sur l’action que sur le poète si laborieusement vainqueur de la dureté des noms hollandais. L’Épître sur l’Amour