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Page:Lanson - Boileau, 1922.djvu/82

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BOILEAU.

en jeu, et qu’enfin ce satirique était un critique, tandis que les critiques jusque-là n’étaient que des satiriques. Et de là vient que la satire n’avilit point son auteur : au lieu qu’à l’ordinaire, dans les querelles des gens de lettres, le mépris des rieurs ne distinguait guère celui qui faisait rire de celui qui apprêtait à rire.

Cependant les battus n’étaient pas contents, on le conçoit ; et plusieurs ripostèrent avec violence aux Satires. Il ne vaut pas la peine de s’arrêter sur tous ces libelles, en vers ou en prose, signés de Cotin, de Coras, de Boursault, de Carel de Sainte-Garde, de Pradon, de Bonnecorse, qui s’échelonnent de 1666 à 1689 : ce ne sont que chicanes puériles, insinuations perfides, ou injures grossières. Nommer Despréaux Desvipéreaux, lui reprocher d’avoir fait servir des alouettes au mois de juin dans son Repas ridicule, glorifier Pelletier de recevoir chaque jour vingt-cinq personnes à sa table, traiter l’auteur des Satires de « bouffon » et de « faussaire », ou de « jeune dogue » qui aboie autour de lui, et lui dire agréablement qu’il ne fait rien « que les mouches ne fassent sur les glaces les plus nettes », le menacer du bâton ou faire entendre que les cotrets ont déjà pris le contact de ses épaules, trouver dans ses vers des insultes au parlement, à la cour, au clergé, au roi, et un athéisme digne du sort de Vanini, le reprendre tantôt d’user « de quolibets des carrefours, de déclamations du Pont-Neuf qui ne peuvent être souffertes que dans un impromptu de corps de