Aller au contenu

Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/129

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

meurait aussi fière, aussi indépendante qu’à la tête de quatre cent mille hommes, ou que sur le trône quand il faisait des rois.

À l’article des réductions de nos dépenses et de l’argent qu’on demandait à l’Empereur, il a répondu : « Tous ces détails me sont trop pénibles, ils sont ignobles. Vous me mettriez sur les charbons ardents de Montézuma ou de Guatimozin, que vous ne tireriez pas de moi l’or que je n’ai pas. D’ailleurs qui vous demande quelque chose ? qui vous prie de me nourrir ? Quand vous discontinueriez vos provisions, si j’ai faim, ces braves soldats que voilà, en montrant de la main le camp du 53e, prendront pitié de moi ; j’irai m’asseoir à la table de leurs grenadiers, et ils ne repousseront pas, j’en suis sûr, le premier, le plus vieux soldat de l’Europe. » L’Empereur ayant reproché au gouverneur d’avoir gardé quelques ouvrages qui lui étaient adressés, il a répondu que c’était parce que l’adresse portait la qualification d’empereur. « Et qui vous a donné le droit, a répliqué l’Empereur, de me disputer ce titre ? Dans peu d’années, votre lord Castlereagh, votre lord Bathurst et tous les autres, vous qui me parlez, vous serez ensevelis dans la poussière de l’oubli ; ou, si on connaît vos noms, ce sera par les indignités que vous aurez exercées contre moi, tandis que l’empereur Napoléon demeurera toujours sans doute le sujet, l’ornement de l’histoire