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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/140

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ressouvenu que quatre fois Napoléon lui a restitué son trône : à Léoben en 1797, et à Lunéville en 1801, lorsque ses armées étaient sous les murs de Vienne ; à Presbourg en 1806, et à Vienne en 1809, lorsque ses armées étaient maîtresses de la capitale et des trois quarts de la monarchie. Ce prince se fût ressouvenu des protestations qu’il lui fit au bivouac de Moravie en 1806, et à l’entrevue de Dresde en 1812. – Si la personne de l’empereur Napoléon eût été au pouvoir de l’empereur Alexandre, il se fût ressouvenu des liens d’amitié contractés à Tilsit, à Erfurt, et pendant douze ans d’un commerce journalier ; il se fût ressouvenu de la conduite de l’empereur Napoléon le lendemain de la bataille d’Austerlitz, où, pouvant le faire prisonnier avec les débris de son armée, il se contenta de sa parole, et lui laissa opérer sa retraite ; il se fût ressouvenu des dangers que personnellement l’empereur Napoléon a bravés pour éteindre l’incendie de Moscou et lui conserver cette capitale ; certes, ce prince n’eût pas violé les devoirs de l’amitié et de la reconnaissance envers un ami dans le malheur. — Si la personne de l’empereur Napoléon eût été même au pouvoir du roi de Prusse, ce souverain n’eût pas oublié qu’il a dépendu de l’Empereur, après Friedland, de placer un autre prince sur le trône de Berlin ; il n’eût point oublié un ennemi désarmé, les protestations de dévouement et les sentiments qu’il lui témoigna en 1812, aux entrevues de Dresde. Aussi voit-on par les articles 2 et 5 dudit traité, que ne pouvant influer en rien sur le sort et la personne de l’empereur Napoléon, qui n’est pas en leur pouvoir, ces princes s’en rapportent à ce que fera là-dessus Sa Majesté Britannique, qui se charge de remplir toutes les obligations. Ces princes ont reproché à l’empereur Napoléon d’avoir préféré la protection des lois anglaises à la leur. Les fausses idées que l’empereur Napoléon avait de la libéralité des lois anglaises et de l’influence d’un peuple grand, généreux et libre sur son gouvernement, l’ont décidé à préférer la protection de ses lois à celle de son beau-père ou de son ancien ami. L’Empereur Napoléon a toujours été le maître de faire assurer ce qui lui était personnel par un traité diplomatique, soit en se remettant à la tête de l’armée de la Loire, soit en se mettant à la tête de l’armée de la Gironde, que commandait le général Clausel ; mais ne cherchant désormais que la retraite et la protection des lois d’une nation libre, soit anglaise, soit américaine, toutes stipulations lui ont paru inutiles. Il a cru le peuple anglais plus lié par sa démarche franche, noble et pleine de confiance, qu’il ne l’eût pu être par les traités les plus