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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/227

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plusieurs paires de pistolets, d’autre emploi que de veiller froidement à brûler la cervelle de celui qui avancerait la main pour saisir l’Aigle. Or, pour obtenir ce poste, ils étaient obligés de faire preuve qu’ils ne savaient ni lire ni écrire, et vous devinez pourquoi. – Non, Sire. – Nigaud ! tout soldat qui sait lire et écrire, et a de l’instruction, avance toujours ; mais celui qui n’a pas ces avantages ne parvient bien certainement qu’à force d’actes de courage et par des circonstances extraordinaires, etc.[1]. »

  1. Au moment d’envoyer à l’impression, le hasard m’ayant fait mentionner cette circonstance à deux ou trois militaires, ils m’ont dit ne pas avoir eu connaissance de cette institution, sans me garantir toutefois qu’elle n’existât pas. Ne feraient-ils que l’ignorer, ou me serais-je trompé moi-même en prenant pour fait, dans les paroles de l’Empereur, ce qui n’eût été qu’intentionnel ?
        N. B. J’avais cru un devoir de consigner ici la défiance que j’avais de moi-même en cette occasion, et mes scrupules n’ont pas tardé à recevoir leur récompense ; car ce sont eux précisément qui m’ont procuré la certitude dont je manquais. À peine le Mémorial avait-il paru, qu’il m’a été adressé à la fois, bien que de deux points fort éloignés, l’assurance positive que je ne m’étais point trompé, et que je devais reprendre pleine et entière confiance dans l’exactitude de mon récit ; et chacun des bienveillants informateurs a eu le soin de joindre à son témoignage des détails authentiques que je vais transcrire ici.
        « L’institution que vous mentionnez, me mandait le premier, officier au 9e de ligne, existait réellement ; ces sous-officiers étaient choisis et armés ainsi que vous le dites, etc. ; je les ai constamment vus au régiment dont je faisais partie jusqu’en 1814, etc. »
        Le second, ancien sous-inspecteur aux revues, allait plus loin encore ; il me transmettait le texte même des décrets relatifs à cette institution.
        Premier décret, du 18 février 1808. (Berriat, Législation militaire, 2e vol., p. 47.) « Deux braves, pris parmi les anciens soldats non lettrés, qui, par cette raison, n’auront pu obtenir d’avancement,