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Page:Las Cases - Mémorial de Sainte-Hélène, 1842, Tome II.djvu/408

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par une autre route, et qu’il fallait laisser cette satisfaction aux notables des provinces, ils n’en revenaient pas moins toujours désignés. » Et ceci me rappelle que dans le temps, un des ministres (Decrès) me racontait avoir eu une prise avec l’Empereur précisément à ce sujet. Il le grondait de sa nomination : « Mais, Sire, lui répondit-il plaisamment, votre influence est plus forte que votre volonté ; j’ai beau dire que je n’en veux pas, que cela vous déplaît, que vous voulez qu’ils se réservent ces nominations entre eux, ils ne connaissent que votre choix, et je serai renommé tant que vous m’y enverrez. »

« J’avais, disait encore l’Empereur, donné des traitements énormes aux préfets et autres ; mais, en fait de prodigalité de ma part, faudrait-il encore savoir distinguer ce qui est de système ou de circonstances. Celles-ci me forçaient à donner de gros appointements, l’autre m’eût conduit à obtenir gratuitement. À l’origine, lorsqu’il s’agissait d’attacher des individus, de recomposer une société et des mœurs à l’avenant, de gros traitements, une véritable fortune étaient indispensables ; mais le résultat obtenu, et avec le temps rentré dans l’ordre naturel, mon intention, au contraire, eût été de rendre la plupart des hautes fonctions à peu près gratuites. J’eusse élagué les nécessiteux, qui jamais ne s’appartiennent à eux-mêmes, dont les besoins pressants créent l’immoralité politique ; j’eusse amené l’opinion à solliciter ces