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Page:Latocnaye - Promenade d’un Français dans la Grande Bretagne, 1795.djvu/55

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guents, bien gras et bien onctueux, et sur le champ voila mon vilain, qui se persuade que ce sont des confitures, et pense que cela ne peut pas arriver plus a propos pour lui servir de dessert, et qui en consequence se préparé a s’en regaler. L’apothicaire voyant son intention, et craignant avec raison les consequences funéstes qui devaient s’en suivre, s’elance dessus ses onguents, pour tacher de les lui arracher ; l’autre, qui s’imagine qu’il veut lui enlever sa proie, en devient plus âpre a la curée ; et comme l’apothi caire insistait en tachant de lui faire entendre que ce n’était point bon a manger, mon Prussien, les yeux étincellans de rage, tire son sabre, et prononçant avec fureur, le grand juron, sacrament der tyffel, se prépara a pourfendre l’apothicaire, qui épouvanté, les yeux ouverts, la bouche béante, et les bras tombans, le regarde en silence devorer ses onguents avec la grande cuiller de bois, dont on se sert pour les remuer, et qui semblait encore trop petite pour satisfaire son avidité. La conséquence toute naturelle de ce nouveau repas fut, qu’a peine il en eut avallé une ou deux livres, joint a la viande qu’il avait deja englouti, et au vin qu’il a-