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Page:Lauris - L’Écrin du rubis, 1932.djvu/124

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L’ÉCRIN DU RUBIS

beaux bas sortis de ses métiers : « La Reine n’a pas de jambes » ; de cette rigueur qui interdisait à des courtisans fortuitement témoins des beautés callipyges d’une reine désarçonnée, de se porter à son secours — tant il est vrai que pour l’imagination, posséder la jambe, c’est posséder la Femme, — de ce code de la jalousie procède sans doute le soin si méticuleux que les Espagnoles, réputées déjà pour avoir le plus joli pied du monde, apportent à attifer, pomponner et enrubanner leurs jambes.

D’une coquetterie commune à la Femme où l’entraîne la vertu lascive de cette partie du corps, elles se font une jouissance d’autant plus vive que les mœurs, par leurs prescriptions, ont étendu un plus grand mystère sur un attrait déjà irrésistible par lui-même. Il n’est peut-être pas de pays où, plus qu’en Espagne, la sensualité ait prodigué les falbalas autour de la jambe, fait chanter les frou-frous des volants écumeux, ménagé les ombres et les lueurs de la cheville au genou dans un fouillis de grands et de petits jupons, de balayeuse et de traîne emmêlant leurs vagues épaisses et profondes aux nuages olympiens d’un pantalon échelonné de six ou sept rangs de dentelles du jarret à la ceinture.

Il n’est pas comme l’Espagnole pour avoir pratiqué la science des dessous et attaché de valeur aux mille détails qui en composent l’effet. Elle y a porté ce goût de la surcharge et du flamboyant propre au Midi, qui,