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Page:Lauris - L’Écrin du rubis, 1932.djvu/125

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L’ÉCRIN DU RUBIS

s’il n’est pas toujours de bon aloi, trouvait, en cette matière, aux yeux de l’imagination, mieux qu’une excuse par tout ce que cet excès lui ménageait d’inattendu.

Et comme la décence et la correction mondaine proscrivaient le retroussé, on peut dire que c’est pour elle-même, señora ou gitane, pour la joie de ses sens qu’elle enfermait ainsi dans la châsse splendide des plus riches tissus, cette partie de ces charmes dont les mœurs lui faisaient l’objet d’une concupiscence encore plus ardente par ce qu’elles mettaient de pudeur à les cacher, ou de honte à les découvrir. Si bien que pour l’Espagnole, le péché de luxure s’étendait de son pudendum jusqu’au bout de son pied.

Symbole de l’abandon charnel, sa jambe s’offrait à son plaisir avec toutes les vertus érogènes qu’elle tenait d’une observation qui, mise en éveil de bonne heure par les défenses de la morale, avait associé le charme naturellement troublant de ce membre, la grâce provocante de ses flexions et le langage évocateur de ses mouvements à des sensations d’attouchement, à des froissements de chair contre chair, à des contacts délicats du linge, au frisson d’un volant sur la peau, bref à toutes les images enivrantes des appétitions de l’instinct. L’interdit dont la jambe était l’objet lui en soulignait les beautés conquérantes ; et de ce qu’on attachait à sa montre la signification d’une faveur après laquelle la Femme n’avait plus rien à refuser, l’Espagnole se faisait une volupté conti-