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Page:Lauris - L’Écrin du rubis, 1932.djvu/224

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L’ÉCRIN DU RUBIS

Jamais, peut-être, l’aphorisme baudelairien que la Mode est une sublime déformation de la Nature, ne trouva une plus exacte application qu’à cette réformation mensongère mais séduisante de nos lignes où s’évertue le tourment sensuel de notre époque. Il marque son outrance dans les illustrations des magazines de luxe, les cires de Siegel, et les portraits de Van Dongen et de quelques autres maîtres du Surréalisme. La stylisation fuselée de la beauté contemporaine, en son allongement démesuré et sa minceur indéfinie, n’est que le rêve maladif de l’obsession irritante que la jupe courte nous fait de l’érotisme de la jambe.

Nicole m’a conquise au charme de cette stylisation où le goût trouve la sensation de l’inconnu. Je m’y abandonne sans réserve dans les moments où sa séduction froide cède aux accès d’un tempérament dont toute l’ardeur est cérébrale. Elle me fait asseoir devant elle sur un coussin, et à la manière de la Princesse Pauline Borghèse qui aimait fort d’utiliser ses dames d’honneur comme tabourets pour ses pieds nus et leurs cuisses comme chaufferettes, de la pointe et du talon de ses fines chaussures elle laboure doucement ma chair. Ce sont alors de soudains alanguissements à se sentir sous la caresse de mon adoration muette. J’imbois mes yeux