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Page:Lauris - L’Écrin du rubis, 1932.djvu/75

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L’ÉCRIN DU RUBIS

dans les tiroirs des amoureux ! Dongan, l’amant de miss Price, avait empli toute une cassette des gages d’amour qu’il tenait d’elle et parmi ces faveurs, à des mèches de ses cheveux se mêlaient des épis de ses floraisons plus discrètes. Combien de gentilshommes de l’expédition de l’île de Ré, qui avaient enrubanné leur virilité d’un galon dont tout le prix venait de l’usage secret qu’en avait fait au préalable leur maîtresse ! Qui ne sait qu’Henri III s’éprit de Marie de Clèves sous l’effet de l’odeur dont en dansant elle avait imprégné sa chemise qu’il avait pu lui dérober après le bal ? Les galants soupirants des dames galantes ne les priaient-ils pas de porter plusieurs jours leurs bas de soie avant qu’ils ne les missent eux-mêmes, et un amoureux de Messaline n’avait-il pas toujours sur soi, comme relique d’elle, un de ses escarpins dont elle lui avait marqué sa faveur ? Quelle évocation troublante est pour chacun le pantalon d’une élégante égaré à portée de la main, une jarretière encore mâchée de l’étau du jarret, l’odeur d’un gant ou d’un corsage, la grâce d’un geste qui découvre et cache à la fois ! Quel n’était pas l’attrait du balancement d’une jupe, ou son envol au temps des flamboyants dessous, lorsque la Femme, ainsi que les déesses de l’Olympe, se faisait un rempart des enveloppements de nuées floconneuses, une pudeur des blanches écumes qui la caressaient de leurs frissons ! Comment s’étonner alors que des hommes plus avides d’illusions que d’autres,