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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/106

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RUMENGOL, LE PARDON DES CHANTEURS

chef du clan de Cornouailles leva vers le ciel sa face vénérable toute baignée de larmes — et pria. Le vent apaisé du soir se jouait dans sa barbe blanche. Mais d’une détresse infinie son cœur était plein, et les paroles qui s’exhalaient de ses lèvres étaient navrantes comme des sanglots… Dans les lointains gris de la mer le jour achevait de s’éteindre.

« — Viens ! » commanda Gwennolé.

Ils s’acheminèrent au pas de leurs montures du côté du septentrion. Ils gravirent d’âpres côtes hérissées de brousses, plongèrent dans des ravins peuplés de roches monstrueuses qu’on eût prises pour des troupeaux de bêtes d’autrefois, pétrifiées. Très vite ils avaient perdu de vue la mer, mais, à travers les grands embruns flottant derrière eux dans l’espace, ils perçurent longtemps sa chanson sinistre. Parfois, au milieu de ce bruit sauvage, un appel strident éclatait dans la direction du large. Gwennolé disait

« — Ce sont les goëlands qui regagnent leurs nids. »

Gralon songeait :