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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/188

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RUMENGOL, LE PARDON DES CHANTEURS

sacrée. On rêve d’une prêtresse des cultes primitifs, d’une possédée des anciens dieux. Des parcelles subtiles de leur âme ont dû survivre dans cette atmosphère de Rumengol.

… Je m’en suis allé par des sentiers de traverse, le long de la petite rivière, vers le Faou. Il est trois heures environ. Déjà des blancheurs rosées illuminent doucement les confins du ciel. C’est à croire qu’il dit vrai, le dicton local, qui prétend qu’ici, tant que dure le pardon, la nuit même est encore du jour. La brise de mer s’est levée. Entre les verdures une chose claire apparaît, une pointe d’Océan enfoncée aux cœur des terres. Et voici Le Faou, vieux murs, vieilles ardoises, toute une bourgade citadine d’un aspect d’autrefois dominée par la maison de ville, débris monstrueux de l’époque féodale. Un quai, une mâture de sloop finement découpée sur le fond gris-perle des eaux lointaines, la solitaire silhouette d’un gabelou perchée à l’extrêmité du môle dans l’attitude d’un cormoran au repos. Les brumes d’ouest en s’effrangeant découvrent des