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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/248

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LA TROMÉNIE DE SAINT RONAN



Bim baon, cloc’hou !
Marw ê Jégou
Gant eur c’horfad gwadigennou !…
[1]

(Bim baon, les cloches ! — Il est mort, Jégou, — d’une ventrée de boudin !)

Ainsi chantait, à voix haute et stridente, Kébèn l’effrontée. Les bœufs cependant débouchaient dans le pré et ils cheminaient droit devant eux, sans souci du linge qui séchait étalé sur l’herbe. Déjà ils piétinaient de leurs durs sabots les nappes de toile fine. Kébèn, du coup, cessa de chanter. Echevelée, noire de fureur, elle se jeta à la tête des animaux :

« — Arrière, sales bêtes » cria-t-elle.

Et, brandissant son battoir, elle les en frappa avec une telle violence qu’elle écorna l’un d’eux. Ils n’en continuèrent pas moins leur route, de leur bonne allure tranquille. Alors la rage de Kébèn se tourna contre le cadavre. Elle s’était cramponnée au chariot, ad risque de se faire écraser, et, à chaque tour de roue, des paroles

  1. C’est un refrain populaire très répandu en Bretagne et que l’on
    chante aux enfants pour les bercer.