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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/270

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LA TROMÉNIE DE SAINT RONAN

carrières abandonnées, côtoie des champs de blé noir, se perd enfin dans une lande, vaste étendue de gazon roussi, luisante au soleil comme un miroir immense que les nuages balaient de leurs grandes ombres. Au milieu de la lande est vautré le monstre de granit. Il a bien les formes étranges et colossales de quelque animal des temps fabuleux. Le culte dont il est l’objet remonte certainement à une époque de beaucoup antérieure à notre ère. On sait de quel naturalisme profond était empreinte la mythologie celtique. Tout dans la nature lui apparaissait comme divin, les arbres, les sources, les rochers. Ces antiques conceptions sont demeurées vivaces au cœur du peuple breton. Le christianisme s’est superposé à elles ou les a tirées à lui ne les pouvant détruire, il les a confisquées. Mais il n’est pas nécessaire de creuser très avant dans l’âme de la race pour retrouver intact le fond primitif. En ce qui est de la pierre de Ronan, on lui a longtemps attribué une vertu fécondante. Il y a peu d’années encore, les jeunes épousées s’y venaient frotter le ventre, dans les premiers mois du mariage, et les femmes stériles, pendant