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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/31

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AU PAYS DES PARDONS

vis qui achevait de nouer ses souliers sur le pas de sa porte.

« — Et de quel côté allez-vous aujourd’hui, Mônik vénérable ? »

« — Pas loin, mon petit… Au pays de Trédarzec : deux lieues à peine, par la traverse. »

« — Savez-vous, mère Môn ; puisque c’est si près, laissez-moi vous accompagner. »

Elle hocha la tête à plusieurs reprises, en faisant : heu !… heu !… d’un air indécis, comme si ce que je lui demandais là eût été très grave. Puis, au bout d’un instant :

« — Viens tout de même », me dit-elle.

Nous nous mîmes en route, dans l’exquise fraîcheur des choses matinales. J’étais tout fier de voyager ainsi aux côtés de la vieille Môn que je considérais comme une personne d’essence supérieure, en commerce perpétuel avec les saints. Nous suivions des sentiers qui n’étaient certainement connus que d’elle, et qui coupaient court, à peine frayés, à travers les hautes herbes des prairies et les fourrés épineux des landes. Un grand silence planait sur la campagne mouillée.