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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/322

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SAINTE-ANNE DE LA PALUDE

faire avec elles, avant la prochaine campagne, une mélancolique et suprême veillée d’amour. Sainte Anne a l’indulgence des grand’mères. Elle ne se scandalise point de ces rendez-vous nocturnes ; elle les favorise, au contraire, étend sur eux le dais velouté de son ciel piqué d’étoiles, leur prête sa dune moelleuse, les recoins discrets de ses grottes tapissées d’algues, les enveloppe de mystère, de poésie, de sérénité. Elle sait d’ailleurs l’héréditaire chasteté de cette race et que l’amour, à ses yeux, est une des formes de la religion. Marie-Ange, il est vrai, nous a raconté tantôt l’histoire d’une Capenn, d’une fille du Cap-Sizun, « qui attrapa au pardon de la Palude une maladie de trente-six jeudis ». Mais, si l’on cite de tels exemples, c’est que précisément ils sont rares. Les couples que nous avons frôlés se tenaient la main, sans dire mot, absorbés dans une contemplation muette où leurs âmes seules communiquaient. Et leurs pensées paraissaient plutôt graves que folâtres. Ils me remirent en mémoire deux vers d’une chanson de bord entendue naguère au pays de Paimpol :