Aller au contenu

Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/336

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
315
SAINTE-ANNE DE LA PALUDE

avaient endurées l’un et l’autre pendant cette nuit terrible.

« — Oui », disait le jeune homme, « il s’en est fallu de peu qu’au lieu de t’épouser je n’épousasse la mer… Est-elle assez jolie cette heure, la gueuse ! » ajouta-t-il, en se penchant sur l’eau qui ondulait doucement, claire et profonde, au pied du roc.

Mais il n’avait pas fini de parler qu’il se rejetait vivement en arrière. Il était livide. II cria :

« — Malheur ! Une lame sourde ! »

Une espèce de beuglement monta du gouffre ; une masse liquide, une forme échevelée de bête, bondit…

Quand l’ilienne qui s’était évanouie rouvrit les yeux, un groupe de pèlerines faisaient cercle autour d’elle, agenouillées et en prières, ne doutant point qu’elle ne fût morte.

« — Et Kaour[1] ? » interrogea-t-elle, dès qu’elle eût recouvré ses sens ; « où est Kaour ? »

Personne ne put lui donner des nouvelles de son fiancé. La mer avait une mine innocente

  1. Diminutif de Corentin.