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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/346

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SAINTE-ANNE DE LA PALUDE

l’embarcation, seule épave qu’ait revomi la tourmente.

Tous ces hommes chantent à haute voix. Leur allégresse néanmoins, surexcitée chez plus d’un par les libations de la matinée, demeure sérieuse, presque triste.

« — Que voulez-vous ? m’a dit l’un d’eux ; sainte Anne bénie fait pour nous ce qu’elle peut et nous l’en remercions de toute notre âme. Mais, tandis que nous clamons vers elle notre action de grâces, nous entendons là-bas l’autre qui rit… Et, vous savez, quand celle-là vous a lâché une fois, deux fois, gare à la troisième ! On ne triche pas impunément la mer… »

… Le soir descend. Les croix, les bannières viennent de rentrer à l’église. Aussitôt la dispersion commence. Les chariots s’alignent, s’ébranlent, partent au grand trot de leurs attelages reposés. Le torrent des piétons s’écoule par toutes les issues. Le regard suit longtemps ces minces files sinueuses et bariolées qui serpentent à tra-