Aller au contenu

Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/42

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
21
SAINT-YVES, LE PARDON DES PAUVRES

entre la veuve et moi. Je te prie de l’aller trouver en mon nom… »

On sait avec quelle ponctualité la « pèlerine » par procuration s’acquitta de cet office.

Il paraît que, dans le cours de l’année, la veuve tomba en « languissance », sécha sur pied comme une plante atteinte dans ses racines et, finalement, trépassa. Le matelot avait eu gain de cause…

C’est chose superflue, j’imagine, de faire remarquer combien cette forme populaire du culte de saint Yves rappelle la fameuse épreuve du Jugement de Dieu si usitée au moyen âge[1]. Aujourd’hui, le petit oratoire de Porz-Bihan n’existe plus. Quand j’y suis revenu, cet été, pour y rafraîchir mes impressions d’autrefois, j’ai revu, dans le ravin, la vieille fontaine, avec son eau si noire qu’elle ne m’a point renvoyé mon image lorsque je m’y suis penché ; et, sur le plateau découvert, j’ai revu le colombier promenant autour de lui la même ombre solitaire. J’ai aussi reconnu les ormes, plus tordus que jamais et comme immobilisés en des attitudes paraly-

  1. Avec quelque chose de plus moral, toutefois.