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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/45

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AU PAYS DES PARDONS


Impressionnée par le ton singulier dont étaient prononcées ces paroles, la servante s’empressa d’avertir son maître, bien qu’il n’aimât guère à être dérangé au cours de ses repas. Le recteur, sa serviette à la main, parut aussitôt sur le seuil de la salle à manger. Il avait la mine furieuse.

« — Sortez d’ici, cria-t-il, vagabonds de grand’route que vous êtes ! Saint Yves n’a que faire de vos prières homicides. »

« — Soit ! répondit avec calme l’un des inconnus. Puisqu’il en est ainsi, nous t’assignons tous les trois à son tribunal. C’est aujourd’hui samedi. Il te reste la nuit pour te repentir. Demain tu ne célébreras pas la grand’messe !… »

Là-dessus, les personnages mystérieux s’évanouirent, sans qu’on sût comme.

… Le recteur a gagné son lit à l’heure habituelle. Il est triste. Des pensées funèbres le hantent. La servante aussi se sent le cœur étreint d’une angoisse. Elle a beau se tourner et se retourner entre ses draps, elle ne peut s’endormir ; la sinistre prophétie des trois pèlerins retentit obstinément à ses oreilles… Soudain, elle sursaute :