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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/88

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SAINT-YVES, LE PARDON DES PAUVRES

de l’autre côté de l’âtre, se dressait un lit clos, avec son ouverture étroite comme une lucarne et ses petits rideaux de percaline à fleurs retenus par des embrasses. Là, dit-on, saint Yves eut sa couchette de paille et son oreiller de granit, durant la dernière période de sa courte vie, au temps qu’il était « official de Tréguier avec résidence à Kervarzin, dans sa demeure familiale. Bercée au fredon des prières bretonnes, ma songerie évoquait tel autre soir de l’an 1292 où, — peut-être à pareille heure, — le bon saint, sur le point de prendre son repos, crut ouïr qu’on frappait à la porte. Il ne s’étonna point son manoir n’était-il pas une auberge, secourable à tous les sans-gîte et à tous les sans-pain ?… II ne lui vint non plus à l’esprit de héler sa vieille servante, qui dormait. Non. Il se leva lui-même, et, nu-pieds, alla tirer le verrou. (Est-il bien sûr qu’il y eût un verrou ?) La porte ouverte, une bouffée de vent entra, une bouffée de vent froid, chargé de pluie, et aussi la plainte lamentable d’une ribambelle de pauvres gens échoués sur le seuil, pitoyablement morfondus.