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Page:Le Braz - Au pays des pardons, 1894.djvu/96

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SAINT-YVES, LE PARDON DES PAUVRES

invitâmes à s’asseoir à table, avec nous, et notre intention était de les garder aussi à coucher dans la maison. Déjà la servante avait poussé les verrous. On s’était groupé autour de l’âtre, et l’on devisait paisiblement en attendant de dire les grâces. Tout à coup : dao ! dao ! sur la porte.

« — Encore un, » pensâmes-nous, « à qui l’intempérie n’a pas fait peur ! »

« Ma femme courut ouvrir.

« — Jésus-Maria ! » s’écria-t-elle en joignant les mains, « comme il y en a ! Comme il y en a !… »

« Nous vîmes entrer un flot de monde. Et après ceux-ci, il en parut d’autres, puis d’autres encore. La cuisine fut bientôt pleine. Tous nos mendiants habituels étaient là, ceux de Pleumeur et ceux de Trédarzec, ceux de Penvénan, du Trévou, de Kermaria-Sulard… Et parmi eux beaucoup de figures inconnues, des pèlerins nouveaux venus du fin fond du pays, de Ploumilliau, de Trédrèz, et même de Plestin ! Ils faisaient pitié à regarder, trempés jusqu’aux os, avec des mines si lamentables ! Ah ! qu’un peu de bonne soupe chaude leur eût fait du bien !… Et voilà justement qu’il