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Page:Leblond - Leconte de Lisle, 1906, éd2.djvu/440

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Il retrouve dans Bourbon la Sicile, terre pacifique et innocente, où les mœurs pastorales fleurissent avec suavité. Les Taureaux ne sont-ils pas un véritable paysage de Théocrite ? Et, comme à travers l’émotion avec laquelle Empédocle salue pour la dernière fois la Sicile, nous sentons vibrer l’âme du créole ému au souvenir de l’île natale :


Pour la dernière fois, adieu terre si belle.
Rejeton fleurissant de l’antique Cybèle !
Adieu, cité natale, air pur ! bords embaumés,
Je ne foulerai plus vos sentiers bien-aimés,
Mes yeux jamais, beau ciel, ne reverront ta gloire.


Voici comment, dans les Sandales d’Empédocle, il décrit un lever de soleil sur la Sicile :


Sous les baisers du dieu la terre frissonnante
Revêtait du plaisir la rougeur rayonnante.


Dans l’Aurore, c’est un lever de soleil sur Bourbon :


Et l’île rougissante et lasse de sommeil
Chantait et souriait aux baisers du soleil.


Il était destiné à goûter avec finesse et concision la poésie de la Grèce, surtout de la Grèce insulaire, parce qu’il était lui-même insulaire, parce que les mœurs et le décor de son pays n’étaient pas sans une prenante analogie avec ceux des petites îles dont on suit dans l’Odyssée l’histoire naïve.

Il aima dans Bourbon une terre grecque, la Grèce même. À Bourbon, comme en Grèce, les vierges ne portent-elles point avec prédilection les tresses épaisses aux épaules cadencées, bien-aimée créole descendant la colline et filles antiques évoluant en