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Page:Leon Silbermann - Souvenirs de campagne, 1910.djvu/227

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grimaçant, faux et traître des Chinois, combien de fois ne m’a-t-il pas exaspéré ? Nous avions fait à Quang-Tchéou-Wan l’expérience des fourberies qu’il peut dissimuler. Quoi d’ailleurs de plus significatif que ce proverbe, courant dans le Céleste Empire et qu’un mandarin m’a cité : « En regardant la bouche qui sourit, on n’aperçoit pas le rasoir qui tranche ! »

Par l’intermédiaire de notre interprète, notre capitaine expliqua le but de sa mission. Il demandait qu’on mît à notre disposition dix voitures attelées, quinze mulets, vingt bœufs et cent porteurs, le tout devant être payé à Liou-Li-Ho. Il prévenait en même temps qu’au premier mouvement d’hostilité de la part des habitants, les mandarins seraient passés par les armes. Des sentinelles doubles furent placées aux quatre coins du village. Vers quatre heures de l’après-midi, tout ce qu’on avait requis nous était livré. Nous quittâmes l’endroit sans incident et nous allâmes bivouaquer près d’un ruisseau. Le lendemain au point du jour, la compagnie fut fractionnée en deux groupes qu’on envoya réquisitionner encore des porteurs, des voitures et du bétail absolument indispensables à la colonne. Les prix étaient fixés par les mandarins et on ne marchandait jamais. Vers midi, les deux fractions se retrouvèrent au point de départ ayant réquisitionné en tout quinze mulets, quarante bœufs et trois voitures ; quant aux porteurs, on n’avait pu en recruter qu’un petit nombre, tout le monde s’étant enfui à notre approche. On se mit alors en route pour rejoindre la colonne à Liou-Li-Ho où nous arrivâmes dans la soirée. En route, le capitaine s’était vu dans la nécessité de faire fusiller un porteur chinois qui excitait les autres à déserter. Ces exemples sont parfois inévitables en campagne, quand il s’agit du salut d’une colonne.

Peu après, on fut obligé de renvoyer au Tonkin tous les Annamites, tirailleurs et coolies, pour leur éviter les rigueurs de l’hiver. Cette partie de la Chine