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Page:Leroux - Balaoo, 1912.djvu/31

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BALAOO

Les gémissements s’étaient encore rapprochés. C’était comme si, maintenant, on les avait dans l’oreille, comme si quelqu’un, qui eût été tout près, tout près, vous les eût soufflés tout bas… ; on entendait le bruit d’une haleine oppressée et l’étrange phrase désespérée : « Pitié ! Pitié à la maison d’homme ! »

Blondel se retourna d’un bond et courut aux queues de billard. Il en prit une par le petit bout.

— Ah ! non !… N’ouvrez pas ! N’ouvrez pas !… bégaya l’aubergiste. C’est le coup de Lombard et de Camus !… C’est comme ça qu’on les a assassinés !… N’ouvrez pas ! ou nous sommes perdus !…

Il râlait ses mots et il avait un tel tremblement dans sa peur qu’il dégoûta Blondel.

— Ah ! Il n’y a donc que des lâches dans ce pays-là ! De deux choses l’une… ou bien c’est qu’on l’assassine, la petite… ou bien c’est les autres qui se fichent de nous !… Enfin, ajouta-t-il en s’essuyant fébrilement du revers de sa manche de chemise la sueur qui coulait de son front, c’est peut-être bien l’Hubert qui vient prendre sa revanche… Mais nous sommes trois, hein !… Et vous, avec votre revolver, père Roubion.

— N’ouvrez pas ! N’ouvrez pas ! répétait Roubion.

Maintenant on eût dit que Zoé sanglotait derrière la porte.

— Il faut tout de même savoir ce que c’est ! protesta Blondel, toujours armé de sa queue de billard.

Alors il questionna d’une voix forte :

— Qui est là ? qui est-ce qui pleure ?… C’est toi, Zoé ?…

Les sanglots se changèrent en véritables râles.

Brusquement, il fit sauter le verrou et tourna la clef de la porte :