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Page:Leroux - Les Étranges Noces de Rouletabille, 1918.djvu/133

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DE ROULETABILLE
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le même sort… Et maintenant c’était le tour de la mitraille humaine de donner.

— En avant, les amis, à l’assaut !

C’est Ivana qui crie dans cette tempête et qui répète les ordres des chefs dans la langue farouche du Balkan. Na noje ! Na noje !

Les clameurs perçantes des hommes se mêlent au bruit du canon et, semblables à des furies, les voilà tous qui bondissent, nul ne s’occupant ni des officiers ni des camarades qui tombent !

Sautant par-dessus les morts et les mourants, les survivants parviennent à une dizaine de mètres de l’ennemi, mais la paroi rocheuse est presque à pic ici et les arrête un instant… et une flamme terrible les couche sur le sol par centaines ! En avant !… Voilà le marchepied qu’il faut aux survivants ! Ils entassent Les cadavres et ils grimpent sur eux comme des démons !

C’est la fin ! Le Turc s’enfuit, abandonnant tout au vainqueur, ses blessés et ses approvisionnements. Du reste, il n’essaye plus nulle part de résister à une pareille marée humaine qui descend de tous les cols de l’Istrandja…

Rouletabille n’a eu d’yeux, pendant toute cette lutte farouche, que pour Ivana.

Il a renoncé à la protéger et à se protéger lui-même.

Il obéit au mouvement qui l’enveloppe, qui l’emporte derrière elle.

Un moment il l’a vue tomber et il s’est précipité