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Page:Les Caquets de l'Accouchée.djvu/226

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esmerillonnée24 de servante, qui se douta de ce qu’on vouloit dire de la belle Angelique ; et, ayant prins place, le caquet fut renforcé par elle, et meut les autres si fort à caqueter, que le meilleur secretaire n’eust peu rediger le tout par escrit. Neantmoins, encore que leur babilloire allast bien viste, je ne laissay d’en profiter et de remarquer ce que je jugeay pouvoir apporter du contentement aux curieux. Entre autres choses j’appris l’invention qui se praticque parmy les bourgeoises pour paroistre, quoy qu’elles n’ayent ny rente ni revenu.

Sçachez donc, suivant la relation mesme de la procureuse, que l’invention de paroistre25 a esté trouvée par les femmes de practique, depuis quinze ou seize ans en çà, à dessein d’aller au pair avec


24. Vive comme l’émérillon, sorte de faucon.

25. Le paroistre, comme il est dit ici, étoit le ridicule de l’époque. D’Aubigné s’en prend surtout à cette manie d’ostentation, dans son Baron de Fæneste. Le nom même du héros, qui n’est que le verbe grec signifiant paroître ingénieusement francisé, en est une preuve. Dans un livret très rare du même temps, on s’explique ainsi, de la façon la plus claire, sur le mot et sur la chose : « … Un ramoneur lombard, entendant les merveilles des bottes…, jura… qu’il se viendroit icy naturaliser et en achepter deux paires pour se rendre estafier chez quelque honneste homme à bottes, et tascher par ce moyen de parestre (c’est le mot qui court) et faire ses affaires s’il pouvoit. » La mode qui court à présent et les singularitez d’icelle, ou l’ut, re, mi, fa, sol, la, de ce temps, Paris, Fleury Bourriquant, 1613, in-12, p.12.