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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/269

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THUCYDIDE, LIV. IV.

assez occupés de ce que chacun d’eux éprouverait autour de lui, ne pussent se réunir et secourir la place. Si la tentative réussissait, et qu’on parvînt à fortifier Délium, il n’était pas nécessaire qu’il se fit aussitôt une révolution dans le gouvernement de la Béotie. Les Athéniens, maîtres de ces lieux, ravageant les campagnes, et ayant un asile peu éloigné, avaient lieu d’espérer que les affaires ne resteraient pas dans le même état, et qu’ils sauraient bien, avec le temps, les amener au point où ils désiraient : ils n’auraient besoin que de se joindre aux factieux, et ne craindraient pas de voir les Béotiens réunir contre eux toute leur puissance. C’est ainsi qu’avait été concertée l’entreprise.

Chap. 77. Hippocrate devait, quand il en serait temps, marcher contre les Béotiens, à la tête des troupes d’Athènes. Il envoya d’avance Démosthène à Naupacte, avec quarante vaisseaux, pour rassembler dans ce pays les troupes des Acarnanes et des autres alliés, et faire voile vers Syphes, qui devait lui être livrée par trahison. On était convenu du jour où tout s’exécuterait à-la-fois. Démosthène, à son arrivée, reçut dans l’alliance d’Athènes les Éniades, que les Acarnanes obligeaient d’y entrer ; il rassembla tous les alliés de ces cantons, et s’avança d’abord contre Salynthius et les Agréens ses sujets. Après avoir soumis tout le reste, il n’attendait plus que le moment favorable à l’exécution de ses desseins sur Syphes.

Chap. 78. À cette même époque de l’été, Brasidas partit pour l’Épithrace avec dix-sept cents hoplites. Arrivé à Héraclée de Thrachinie, il envoya un message à Pharsale, et invita des partisans de Lacédémone à servir de guides à son armée à travers la Thessalie. Panérus, Dorus, Hippolochidas, Torylas et Strophacus, dont le dernier tenait aux Chalcidiens par les nœuds de l’hospitalité, l’ayant joint à Mélitie d’Achaïe, il se mit en marche. D’autres Thessaliens encore, entre autres Niconidas, ami de Perdiccas, qui vint le trouver de Larisse, offraient de l’accompagner : car, en général, il n’est pas facile de traverser la Thessalie sans guides, surtout avec des hoplites. D’ailleurs, chez les Hellènes même, on se rendrait suspect en passant à travers le pays de ses voisins sans leur agrément. Ajoutons que, de tout temps, en Thessalie, la multitude a eu de l’inclination pour les Athéniens ; et si ces peuples eussent vécu dans l’égalité des droits, au lieu d’être soumis à des Dynastes, jamais Brasidas n’eût paru chez les Thessaliens. Il y eut même des Thessaliens d’un parti contraire à celui de ses guides, qui, s’offrant à sa rencontre au moment où il se préparait à passer le fleuve Épinée, lui dirent que c’était un acte d’injustice d’entrer sur leur territoire sans l’aveu de la nation. Ses guides répondirent qu’ils n’avaient pas l’intention de lui faire traverser le pays contre leur gré ; mais qu’ils étaient ses hôtes, qu’il avait paru sans qu’on l’attendît, et qu’ils avaient cru devoir l’accompagner. Brasidas lui-même représenta qu’il entrait comme ami des Thessaliens, qu’il ne portait pas les armes contre eux, mais contre les Athéniens. Il ne pensait pas qu’il y eût entre les Thessaliens et les Lacédémoniens aucune inimitié qui dût les empêcher de voyager les uns chez les autres ; il n’avait ni la volonté, ni même le pouvoir, d’aller plus loin malgré eux, mais il les priait de ne pas s’opposer à sa marche. Sur ces représentations, ils se retirèrent ; et d’après l’avis de ses guides, il fit une marche forcée, dans la crainte de plus grands obstacles. Le jour même qu’il était parti de Mélitie, il arriva à Pharsale, et campa sur les bords du