Aller au contenu

Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/791

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
790
ARRIEN, LIV. I.

ses vaisseaux, pour empêcher les Barbares de s’y réfugier, détache Philotas à Mycale avec de la cavalerie et trois corps d’infanterie, à l’effet de s’opposer à ce que les barbares puissent prendre terre. Ceux-ci, non-seulement assiégés dans leurs vaisseaux, mais encore privés d’eau, firent voile vers Samos. Après s’être ravitaillés, ils reparaissent devant Milet, et font avancer plusieurs vaisseaux à la hauteur du port, pour attirer les Macédoniens en pleine mer. Cinq de leurs bâtimens se jetèrent dans une rade, entre l’île et le port, dans l’espoir de s’emparer de quelques vaisseaux d’Alexandre, dont les matelots étaient allés au bois, aux fourrages et à d’autres nécessités : Alexandre voyant s’approcher les cinq bâtimens des Perses, garnit de suite au complet dix d’entre les siens et les détache contre l’ennemi, avec ordre de se porter sur lui proue en avant. À ce mouvement inopiné des Macédoniens, les Perses fuient et se retirent vers leur flotte. Le vaisseau des Iasséens, moins bien servi de rames, fut pris, avec son équipage, par les Grecs. Les quatre bâtimens qui l’accompagnaient rejoignirent les autres ; ainsi la flotte des Perses se retira encore sans avoir pu rien faire devant Milet.

Alexandre résolut de dissoudre la sienne, soit manque de fonds, soit intériorité reconnue, soit qu’il ne voulût pas diviser et exposer son armée en partie. Il prévoyait d’ailleurs que tenant l’Asie par ses troupes de terre, et maître des villes maritimes, il en obtiendrait facilement qu’elles fermassent leur port à la flotte des Perses, et qu’alors la sienne lui deviendrait inutile ; que les Barbares ne pourraient ni recruter de rameurs, ni trouver de retraite ; que l’aigle avait présagé que les victoires dans le continent lui assuraient celle sur la mer.

Il marche ensuite vers la Carie, instruit que les Barbares et les étrangers à leur solde se sont retirés en grand nombre dans Halicarnasse. Il se rend maître de toutes les villes situées entre celle-ci et Milet, et campe à cinq stades d’Halicarnasse, dont le siége paraissait devoir tirer en longueur. Cette ville était défendue par sa situation, et par Memnon qui venait de s’y rendre ; Memnon, chargé du gouvernement de l’Asie inférieure, et du commandement de toute la flotte de Darius, l’avait depuis long-temps fortifiée de tous les secours de l’art. La garnison nombreuse était composée, en partie, d’étrangers à la solde du roi, en partie de Perses. Memnon avait enfermé les trirèmes dans le port et comptait encore sur le service que pouvaient rendre les gens de leur équipage.

Le premier jour, Alexandre s’étant approché des murs avec son armée, du côté de la porte de Mylasse, les assiégés firent une sortie ; une escarmouche s’engage : les Macédoniens, accourant de toutes parts, les repoussèrent facilement, et les rejetèrent dans la ville.

Peu de jours après, Alexandre prend avec lui les Hypaspistes, les Hétaires, les phalanges d’Amyntas, de Perdiccas et de Méléagre, les Archers et les Agriens ; tourne la ville du côté de Mynde, pour examiner si l’attaque des remparts serait plus facile vers cet endroit, et s’il ne pourrait tenter un coup de main sur la ville de Mynde : une fois maître de cette place, il attaquait, avec avantage, les murs d’Halicarnasse.

Quelques-uns des habitans de Mynde avaient promis de la livrer, si Alexandre s’y présentait pendant la nuit. Arrivé à l’heure convenue, n’apercevant aucun signal de la part des habitans, n’ayant ni machines ni échelles, moins disposé à attaquer qu’à occuper une ville que la