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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 1, 1835.djvu/792

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ARRIEN, LIV. I.

trahison devait lui ouvrir, il n’en fit pas moins avancer sa phalange, en lui ordonnant de miner le mur. Une tour est renversée, mais sans découvrir les fortifications. Les habitans résistent vigoureusement, et, soutenus par ceux d’Halicarnasse venus à leur secours par mer, déjouent l’espoir qu’Alexandre avait conçu d’enlever Mynde du premier abord.

Alexandre déçu, revient au siége d’Halicarnasse. Les assiégés avaient creusé autour de leurs murs un fossé large de trente coudées, profond de quinze. Alexandre le fait combler, afin d’approcher les tours, dont les traits écartent l’ennemi des murailles que les autres machines doivent ébranler. Les approches étaient faites : les habitans d’Halicarnasse exécutent, dans la nuit, une sortie pour brûler les tours et les machines avancées ou près de l’être ; ils sont bientôt repoussés par les Macédoniens de garde, et par ceux que le tumulte fait accourir. Ceux d’Halicarnasse perdirent dans cette affaire cent soixante-dix des leurs au nombre desquels Néoptolème, l’un des transfuges vers Darius. Du côté des Macédoniens, seize soldats furent tués et trois cents environ blessés ; le combat ayant eu lieu de nuit, ils n’avaient pu se mettre à couvert des traits.

Peu de jours après, deux Hoplites, du corps de Perdiccas, faisant à table un récit pompeux de leurs prouesses, piqués d’honneur, échauffés de vin, courent de leur propre mouvement aux armes, s’avancent près du fort, sous les remparts qui regardent Mylasse, plutôt pour faire montre de bravoure, que dans le dessein de tenter avec l’ennemi un combat trop inégal. Surpris de l’audace de ce couple téméraire, quelques assiégés accourent : les premiers sont tués, ceux qui les suivent de plus loin, percés de traits : mais enfin le nombre et l’avantage du lieu l’emportent ; les deux Grecs sont accablés sous une multitude de traits et d’assaillans. D’un côté, des soldats de Perdiccas ; de l’autre, des Halicarnasséens accourent ; la mêlée devient sanglante aux pieds des remparts ; leurs défenseurs sont enfin repoussés dans la ville ; peu s’en fallut qu’elle ne fût prise, car les postes étaient assez mal gardés ; deux tours étaient abattues avec le mur qui s’étendait entre elles ; la brèche livrait la ville, si l’armée eût donné tout entière : une troisième tour ébranlée n’aurait point résisté au choc. Les assiégés élevèrent, derrière le mur renversé, un ouvrage de brique en demi-lune ; un grand nombre d’ouvriers l’acheva rapidement.

Le lendemain Alexandre fait avancer ses machines vers cet endroit ; les assiégés font une nouvelle sortie, tentent de mettre le feu aux machines ; celles qui étaient près du mur, et une tour de bois, sont la proie des flammes ; Philotas et Hellanicus les écartent de celles confiées à leur garde. Venant à rencontrer Alexandre, ils laissent les torches dont ils menaçaient l’ennemi, jettent presque tous leurs armes, et courent se renfermer dans leurs murailles ; là ils avaient l’avantage de la position et de la hauteur : non-seulement ils tiraient de front sur les assaillans que portaient les machines, mais encore du haut des tours qui s’élevaient à chaque extrémité du rempart abattu, ils attaquaient et frappaient en flanc, et presque par derrière, l’ennemi qui assaillait le nouvel ouvrage.

Et comme de ce côté Alexandre faisait avancer de nouveau, quelques jours après, ses machines qu’il dirigeait lui-même, voilà que toute la ville sort en armes, les uns du côté où fut la brèche et où Alexandre donnait en per-