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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/617

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POLYBE, LIV. V.

salie, mais surtout le côté de la Magnésie, qu’habitent les Démétréens, et celui de la Thessalie, où sont les terres de Pharsale et de Phérée. Pendant que cette ville était sous la puissance des Étoliens, ils firent, par leurs courses continuelles de grands ravages sur les terres de Démétriade, de Pharsale, et même de Larisse. Ils poussèrent plusieurs fois leurs courses jusqu’à la plaine d’Amyrique. C’est pour cela que Philippe regardait la conquête de cette ville comme une chose importante, et qu’il y donnait tous ses soins. Ayant donc fait provision de cent cinquante catapultes et de vingt-cinq machines à lancer des pierres, il approcha de Thèbes, et, ayant partagé son armée en trois corps, il la logea dans les postes les plus rapprochés de la ville. Une partie campait auprès de Scopie, la seconde aux environs d’Héliostropie, et la troisième sur le mont Hémus, qui commande la ville. Tout l’espace qui s’étendait entre ces trois corps de troupes, il le fit fortifier d’un fossé, d’une double palissade et de tours de bois, à cent pas l’une de l’autre, où il mit une garnison suffisante.

Ayant ensuite assemblé toutes ses munitions, il fit approcher ses machines de la citadelle. Pendant les trois premiers jours, les assiégés se défendirent avec tant de valeur, que les ouvrages n’avancèrent point du tout. Mais les escarmouches continuelles et les traits que les assiégeans tiraient sans nombre, ayant fait périr une partie de la garnison et mis le reste hors de combat, l’ardeur des assiégés se ralentit. Aussitôt, Philippe dirige les mineurs contre le château, qui était si avantageusement situé, que les Macédoniens, malgré leur constance et un travail continuel, arrivèrent à peine au bout de neuf jours à la muraille. On travailla tour à tour, sans cesser, ni de jour ni de nuit. Au troisième jour, il y eut deux cents pas de mur percés et soutenus par des pièces de bois. Mais ces pièces n’étant pas assez fortes pour supporter un si grand poids, les murs tombèrent avant que les Macédoniens missent le feu au bois qui les soutenait. On travailla ensuite à aplanir la brèche pour monter à l’assaut. On allait y monter, mais la frayeur saisit les assiégés, et ils rendirent la ville. Par cette conquête, Philippe mettant en sûreté la Magnésie et la Thessalie, enleva aux Étoliens un grand butin, et fit connaître à ses troupes, que, s’il avait manqué Platée, c’était par la faute de Léontius, qu’il avait eu par conséquent raison de punir de mort. Entré dans Thèbes, il mit à l’encan tous les habitans, peupla la ville de Macédoniens, et lui donna le nom de Philippopolis.

Il reçut encore là des ambassadeurs de Chio, de Rhodes, de Byzance et de la part de Ptolémée, au sujet de la paix, et il leur répondit, comme il avait déjà fait auparavant, qu’il voulait bien qu’elle se fît, et qu’ils n’avaient qu’à savoir des Étoliens s’ils étaient dans les mêmes dispositions. Dans le fond cependant, il ne se souciait pas beaucoup de la paix, et il aimait beaucoup mieux poursuivre ses projets. Aussi, ayant eu avis que Scerdilaïdas piratait autour de Malée, qu’il traitait les marchands comme s’ils étaient des ennemis, et que quelques-uns de ses propres vaisseaux avaient été attaqués à Leucade, contre la foi des traités, il équipa une flotte de douze vaisseaux pontés, de huit qui ne l’étaient pas, et de trente à deux rangs de rames, et mit à la voile sur l’Euripe. Son dessein était bien de surprendre les Illyriens ; mais il en voulait principalement aux Étoliens. Il ne savait

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