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Page:Liskenne, Sauvan - Bibliothèque historique et militaire, Tome 2, 1836.djvu/901

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POLYBE, LIV. XXIII.

pérance d’innover et de brouiller, et le gouvernement béotien changea de face. Mais comme depuis vingt-six ans il ne s’était pas rendu de jugement, il se répandit dans les villes, qu’il fallait que les procès des particuliers fussent enfin décidés. Comme il y a plus de personnes peu avantagées des biens de la fortune que de gens riches, il y eut beaucoup de contestations sur ce point ; mais il arriva par hasard un événement qui favorisa beaucoup ceux qui tenaient pour le meilleur parti.

Depuis long-temps Titus Flaminius tâchait de faire rentrer Zeuxippe dans la Béotie, par reconnaissance pour les services qu’il en avait tirés pendant les guerres d’Antiochus et de Philippe. Il obtint alors du sénat qu’il écrirait aux Béotiens pour leur ordonner de rappeler chez eux Zeuxippe, et ceux qui avec lui étaient exilés de leur patrie. Mais ces lettres ne gagnèrent rien sur les Béotiens, ils craignirent que ces exilés, à leur retour, ne les détachassent des Macédoniens ; et pour confirmer l’arrêt rendu contre Zeuxippe et ses adhérens, et auquel ils avaient déjà souscrit, on convoqua une assemblée, où l’on remit sur le tapis tous les chefs d’accusation qu’on avait auparavant contre Zeuxippe. On l’accusa d’abord de sacrilége, prétendant qu’il avait enlevé des lames de la table de Jupiter, laquelle était d’argent ; l’autre crime était d’avoir tué Brachylles ; après quoi ils députèrent Callicrite à Rome, pour dire qu’il ne leur était pas permis de déroger à ce qui avait été une fois établi selon leurs lois. Zeuxippe étant arrivé en même temps à Rome pour y soutenir son droit, le sénat écrivit aux Étoliens et aux Achéens la résistance que faisaient les Béotiens à ses ordres, et leur commanda de mener Zeuxippe dans sa patrie. Les Achéens ne jugeant pas à propos d’employer pour cela des troupes, envoyèrent aux Béotiens des députés qui les exhortèrent à obéir aux ordres du sénat, et à reculer le jugement des affaires qu’ils avaient entre eux, comme ils reculaient la décision des procès qu’avaient intentés contre eux les Achéens, qui, depuis long-temps plaidaient contre les Béotiens pour certains contrats. On promit d’abord aux députés qu’on suivrait leur avis, mais on oublia bientôt ces promesses. Hippias était alors préteur dans la Béotie. Quand Alcétas lui eut succédé, Philopœmen accorda, à quiconque la lui demanda, la permission de reprendre sur les Béotiens tout ce qui lui avait été enlevé par eux, ce qui ne fut pas un léger sujet de guerre entre ces deux peuples. Sur-le-champ on prit à Mirrique et à Simon une partie de leurs troupeaux. Il y eut combat entre ceux qui prétendaient que cette proie leur appartenait, et ce fut le commencement non d’un procès de citoyen à citoyen, mais d’une haine qui n’aurait pas manqué de dégénérer en une guerre sanglante entre les deux nations, si le sénat eût persisté à vouloir que Zeuxippe fût rétabli dans sa patrie. Mais, par bonheur, il n’insista pas davantage ; et les Mégariens pacifièrent les différends en priant Philopœmen de révoquer la permission qu’il avait donnée à ceux de sa contrée qui avaient contracté avec les Béotiens. (Ibid.)


II.


Dispute entre les Lyciens et les Rhodiens.


Voici quel en fut le sujet. Pendant que les dix commissaires mettaient ordre aux affaires de l’Asie, Théætète et Philophron vinrent de la part des Rhodiens demander qu’en récompense de leur attachement au parti des Romains