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Page:Locke - Du gouvernement civil, 1795.djvu/310

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Du Gouvernement Civil,

qui est en sa disposition à faire, à l’égard de ses sujets, des choses que les loix ne permettent point, est, sans doute, un véritable tyran ; et comme il agit alors sans autorité, on peut s’opposer à lui tout de même qu’à tout autre qui envahiroit de force le droit d’autrui. Il n’y a personne qui ne reconnoisse qu’il est permis de s’opposer de la même manière à des magistrats subordonnés. Si un homme qui a eu commission de se saisir de ma personne dans les rues, entre de force dans ma maison et enfonce ma porte, j’ai droit de m’opposer à lui comme à un voleur, quoique je reconnoisse qu’il a pouvoir et reçu ordre de m’arrêter dehors. Or, je voudrois qu’on m’apprît pourquoi on n’en peut pas user de même à l’égard des Magistrats supérieurs et souverains, aussi-bien qu’à l’égard de ceux qui leur sont inférieurs ? Est-il raisonnable que l’aîné d’une famille, parce qu’il a la plus grande partie des biens de son père, ait droit par-là de ravir à ses frères leur portion ; ou qu’un homme riche, qui possède tout un pays, ait droit de se saisir, lorsqu’il lui plaira, de la chaumière ou du jardin de son pauvre prochain ? Bien loin qu’un pouvoir et des richesses immenses, et infiniment plus considérables que le [pouvoir]