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Page:Locke - Du gouvernement civil, 1795.djvu/54

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Du Gouvernement Civil,

à tous ces sujets tout ce qu’il lui plaît ; sans que personne ait droit de se plaindre de ceux qui exécutent ses volontés, ou de former aucune opposition ? Ne faut-il point se soumettre toujours à tout ce que fait et veut un Souverain, soit qu’il agisse par raison, ou par passion, ou par erreur[1] ? Or, c’est ce qui ne se rencontre pourtant point, et qu’on n’est point obligé de faire dans l’état de nature, l’un à l’égard de l’autre : car, si celui qui juge, juge mal

  1. Cette thèse a besoin de quelque modification. Cette obéissance passive n’est ni selon les loix de la nature, ni reçue dans aucune société, dont le suprême Magistrat ne sera pas le despotique tyran. Notre auteur n’a pas voulu abolir le droit de résistance, qu’ont les sujets, qui se sont réservé certains privilèges dans l’établissement de la souveraineté ; ou qui voient que le suprême Magistrat agit ouvertement contre toutes les fins du gouvernement civil. Cette résistance ne suppose point que les sujets soient au-dessus du Magistrat suprême, ni qu’ils aient un droit propre de le punir. Les liens de sujétion sont rompus en ce cas-là, par la faute du souverain, qui agit en ennemi contre ses sujets, et les dégageant ainsi du serment de fidélité, les remet dans l’état de la liberté et de l’égalité naturelles. C’est le sentiment d’une infinité d’auteurs, qui ont mis cette question dans une pleine évidence.